Catégories
Justice:

Groupes nationaux de l’APC d’États non membres des Nations Unies et nomination des juges de la CIJ – EJIL : Parlez !

À compter d’aujourd’hui, l’appartenance à l’Organisation des Nations Unies, et avec elle le statut de partie contractante au Statut de la CIJ conformément à l’art. 93 (1) Charte des Nations Unies, est, contrairement aux premières décennies de l’existence de l’organisation, presque universelle. Pourtant, il existe toujours des entités, et notamment la Palestine et le Kosovo, qui n’ont pas (encore) pu devenir membres de l’organisation étant donné l’absence de consensus au sein de la communauté internationale quant à leur statut d’État, et compte tenu en outre du processus d’admission défini dans l’art. 4 Charte des Nations Unies et en particulier le rôle des membres permanents du Conseil de sécurité dans le processus prévu à l’art. 4 (2) Charte des Nations Unies.

Dans le même temps, la Palestine et le Kosovo, comme nous l’avons vu plus haut ici et ici, sont devenus membres de la Convention de La Haye de 1907 pour le règlement pacifique des différends internationaux (« Convention de 1907 ») (voir ici) et ont ainsi au moins partiellement renforcé leur revendication respective d’État. Qui plus est, ils ont, dans le même ordre d’idées, usé l’un et l’autre de leur droit découlant de l’art. 44 de la Convention de 1907 pour nommer les membres de ce qui est communément appelé leur « groupe national » respectif de l’APC (voir la liste actuelle de tous les membres de l’APC ici).

Cela soulève la question suivante de savoir si ces groupes nationaux de parties à la Convention de 1907 qui sont ne pas cependant, en même temps, les parties au Statut de la CIJ peuvent également participer à la nomination des candidats à un poste de juge de la CIJ – une question qui n’a malheureusement jusqu’à présent guère été discutée, et si ce n’est que brièvement, ici, ici et ici .

C’est l’Art. 4 et 5 Statuts de la CIJ qui régissent la (co-)nomination des candidats aux postes de juge de la CIJ et, comme on le sait, l’art. 4 (1) du Statut de la CIJ autorise généralement groupes nationaux de l’APC de désigner ces candidats « conformément aux dispositions suivantes ». Ce processus de nomination contraste avec la réalité élections des juges, où il ne s’agit que parties au Statut de la CIJ, c’est à dire tous les États membres de l’Organisation des Nations Unies et éventuellement les autres États qui sont autrement devenus États parties au Statut de la CIJ, qu’en vertu de l’art. 4 Statut de la CIJ élisent les juges selon le système à deux chambres prévu à l’art. 10 Statut de la CIJ.

Art. 4 (2) du Statut de la CIJ traite en outre spécifiquement de la situation dans laquelle un État est membre de l’Organisation des Nations Unies mais ne pas de l’APC avec pour conséquence qu’aucun groupe national de l’APC n’existe pour ce même État. À son tour, la situation inverse dans laquelle un État est devenu partie à la Convention de 1907, mais n’est pas (encore) membre de l’Organisation des Nations Unies, n’est pas traitée de manière aussi détaillée dans le Statut de la Cour.

Il est vrai que l’article 4 du Statut de la CIJ prévoit simplement l’obligation du Secrétaire général (à savoir son Bureau des affaires juridiques) d’inviter en temps voulu tous les groupes nationaux de la CPA représentant les parties contractantes au Statut de la CIJ à envoyer des candidatures aux postes de juge de la CIJ, ce qui se fait normalement au moyen d’une lettre adressée au groupe national sous couvert d’un lettre au gouvernement (c’est à dire. les représentants permanents de leurs missions permanentes auprès de l’Organisation des Nations Unies). Cette obligation ne s’étend donc pas à la Palestine et au Kosovo qui, tout en étant parties contractantes à la Convention de La Haye de 1907 (et donc ayant des groupes nationaux APC) sont ne pas parties contractantes du Statut de la CIJ, même si, comme dans le cas de la Palestine, elles sont des États observateurs des Nations Unies.

Dans le même temps, cependant, l’art. 5 (2) du Statut de la CIJ est sans équivoque en affirmant que chaque groupe national (‘chaque chaque groupe’ dans le texte français également authentique de l’art. 5) peut présenter un maximum de quatre candidats sans limiter ce droit aux groupes nationaux qui ont été ainsi invités par le Secrétaire Général. Il en va de même pour l’art. 4 (1) Statut de la CIJ qui se réfère aussi généralement au droit des «groupes nationaux de la Cour permanente d’arbitrage» sans exiger à nouveau que leurs États d’origine soient parties au Statut de la CIJ. Sinon, il aurait été naturel à l’art. 4 (1) limitent ce droit aux groupes nationaux de la CPA dont les États d’origine sont également cumulativement parties au Statut de la CIJ.

En effet, l’art. 4 (3) du Statut de la CIJ traite spécifiquement de la participation des États qui ne sont pas (encore) membres des Nations Unies à la élection processus, mais ne fixe pas les conditions de participation de leurs groupes nationaux APC au processus préalable nomination traiter. Enfin, l’art. 6 Le Statut de la CIJ, qui régit le processus préalable à la nomination proprement dite, parle une fois de plus de « chaque groupe national »/« chaque groupe national » d’une manière globale.

Ceci est encore confirmé a contrario par l’art. 36 (4) lit. a) Statut de Rome, qui dans son alinéa (ii) fait référence à la « procédure prévue pour la désignation des candidats à la Cour internationale de Justice dans le Statut de cette Cour », mais qui en même temps, et contrairement aux art. 4 et 5 du Statut de la CIJ, limite spécifiquement la possibilité de désigner des candidats à l’élection à la Cour pénale internationale aux États parties du Statut de Rome.

Dans l’ensemble, il semble donc que même lorsqu’une entité n’est ni membre des Nations Unies ni autrement partie contractante au Statut de la CIJ, mais est partie contractante à la Convention de 1907, son groupe national peut effectivement participer au processus de nomination. Cela semble également confirmé à la fois par l’historique de la rédaction des dispositions parallèles du Statut de la CPJI (sur lesquelles se fondent les dispositions pertinentes du Statut de la CIJ), ainsi que par la pratique ultérieure de la Société des Nations qui en découle. . Lors de la rédaction notamment, il a été souligné que l’un des avantages de la procédure de nomination était qu’elle liait la CPJI à la CPA et prévoyait leur coexistence (cf. par exemple les remarques de M. de Lapradelle au Comité des juristes dans LN Doc. V 1920.2, p.148 ; J, Golden, National Groups and the Nomination of Judges of the International Court of Justice: A Preliminary Report, 9 Int’l L. 333 (337) (1975)). Qui plus est, à l’époque de la Ligue, même des invitations ont été envoyées à des groupes nationaux d’États parties à la Convention de 1907 alors qu’ils s’étaient retirés de la Ligue (M. Hudson, The Permanent Court of International Justice 1920 – 1942 (1943) , p. 242), et en 1921 le secrétaire général de la Ligue semble avoir envoyé une lettre aux deux, les membres de la Ligue autre les parties contractantes des Conventions de 1899/1907 en ce qui concerne la question des éventuelles nominations pour les arrêts de la CPJI (JO LoN 1921, p. 246 ; cf. également B. Schenk von Stauffenberg, Statut et Règlement de la Cour Permanente de Justice Internationale (1934 ), p. 28).

Bien qu’il n’y ait aucune information publique disponible quant à savoir si les nominations ont été reçues par les groupes nationaux de l’APC de la Palestine ou du Kosovo, ou les deux pour l’élection pour pourvoir le poste vacant causé par le décès de feu le juge Antônio Cançado Trindade (mais cf. aux nominations pour les élections régulières de 2020 (cf. UN Doc A/75/129–S/2020/615), tant le groupe national du Kosovo que le groupe national de l’État de Palestine pourraient, à la lumière de ce qui précède des considérations l’ont fait, et auraient ainsi pu ajouter un pas de plus, bien qu’évidemment petit, vers la reconnaissance du statut d’État de leurs entités de nomination respectives. Il reste donc également à voir si les deux (ou l’un de ces) groupes nationaux exerceront ce droit lors de la prochaine élection régulière des membres de la Cour, et si le Secrétaire général acceptera ces nominations, si elles sont soumises, et dûment les refléter dans la liste des (co)-nominations éventuelles.

Enfin, quant à la procédure, bien que conforme à une pratique constante et de longue date dans l’application des art. 4 et 5 Statuts de la CIJ, ces nominations sont normalement transmises au Secrétaire général des Nations Unies par l’intermédiaire de la mission permanente respective de l’État d’origine du Groupe national de l’APC, aucune exigence de ce type ne figure ni dans le Statut de la CIJ ni ailleurs. En outre, étant donné qu’il n’existe pas de mission permanente de ce type dans le cas du Kosovo, une telle exigence formelle rendrait illusoire l’exercice du droit de son groupe national de (co-)désigner des candidats et devrait, pour cette seule raison, être rejetée